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— La señora était sans doute trop serrée », dit Militona d’un air de naïveté parfaite.

Feliciana, qui, bien que maigre, se laçait au cabestan, répondit de ce ton aigre-doux que les femmes savent prendre en pareille circonstance.

« Je ne me serre jamais. »

Décidément, l’affaire s’engageait mal. La jeune fille du monde n’avait pas l’avantage.

Militona, avec sa robe de soie noire à la mode espagnole, ses jolis bras découverts, sa fleur posée sur l’oreille, faisait paraître encore plus ridicules la recherche et le luxe de mauvais goût de la toilette de Feliciana.

La señora Feliciana Vasquez de los Rios avait l’air d’une femme de chambre anglaise endimanchée ; Militona, d’une duchesse qui veut garder l’incognito.

Pour réparer son échec, la fille de Geronimo essaya de déconcerter la manola en faisant peser sur elle un regard suprêmement dédaigneux ; mais elle en fut pour ses peines, et finit par baisser les yeux devant le regard clair et modeste de l’ouvrière.

« Quelle est cette femme, se dit Militona : la sœur d’Andrès ? oh ! non ; elle lui ressemblerait ; elle n’aurait pas cet air insolent.

— Eh bien ! Andrès, dit Geronimo d’une voix affectueuse, en s’approchant du lit, vous l’avez échappé