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avec anxiété, se sentit le cœur inondé d’une satisfaction indicible.

« Si tu ne veux pas jurer, continua Juancho, affirme-le-moi simplement. Je te croirai ; tu n’as jamais menti ; mais tu gardes le silence, il faut que je le tue... Et il s’avança vers le lit, son couteau ouvert... Tu l’aimes !

— Eh bien ! oui, s’écria la jeune fille avec des yeux étincelants et la voix tremblante d’une colère sublime. S’il doit mourir à cause de moi, qu’il sache du moins qu’il est aimé ; qu’il emporte dans la tombe ce mot, qui sera sa récompense et ton supplice. »

Juancho, d’un bond, fut à côté de Militona, dont il saisit vivement le bras.

« Ne répète pas ce que tu viens de dire, ou je ne réponds plus de moi, et je te jette, avec ma navaja dans le cœur, sur le corps de ce mignon.

— Que m’importe ? dit la courageuse enfant. Crois-tu que je vivrai, s’il meurt ? »

Andrès, par un effort suprême, essaya de se relever sur son séant. Il voulut crier : une écume rose monta à ses lèvres ; sa plaie s’était rouverte. Il retomba évanoui sur son oreiller.

— Si tu ne sors pas d’ici, dit Militona en voyant Andrès en cet état, je croirai que tu es vil, infâme et lâche ; je croirai que tu aurais pu sauver Dominguez lorsque le taureau s’est agenouillé sur sa poitrine