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Elle était là debout, une main appuyée sur le bord du lit d’Andrès, qu’elle semblait vouloir défendre, et l’autre étendue vers la porte avec un geste de suprême majesté :

« Que venez-vous faire ici, meurtrier ? dit-elle à Juancho d’une voix vibrante ; il n’y a qu’un blessé dans cette chambre où vous cherchez un amant ! retirez-vous sur-le-champ. N’avez-vous pas peur que la plaie ne se mette à saigner en votre présence ? N’est-ce pas assez de tuer ? faut-il encore assassiner ? »

La jeune fille accentua ce mot d’une façon singulière et l’accompagna d’un regard si profond, que Juancho se troubla, rougit, pâlit, et sa physionomie de féroce devint inquiète. Après un silence, il dit d’une voix entrecoupée :

« Jure-moi sur les reliques de Monte-Sagrado et sur l’image de Notre-Dame del Pilar, par ton père qui fut un héros, par ta mère qui fut une sainte, que tu n’aimes pas ce jeune homme, et je me retire aussitôt ! »

Andrès attendit avec anxiété la réponse de Militona.

Elle ne répondit pas.

Ses longs cils noirs s’abaissèrent sur ses joues que colorait une imperceptible rougeur.

Bien que ce silence pût être un arrêt de mort pour lui, Andrès, qui avait attendu la réponse de Militona