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tu vas visiter les tailleurs de la Calle-Mayor ; moi, je confesserai les fripiers du Rastro. »

Au bout de quelques heures, les deux amis faisaient leur rapport à l’alcade.

Argamasilla raconta minutieusement et compendieusement le résultat de ses recherches. Un individu revêtu du costume de majo, paraissant fort agité, avait acheté et payé, sans faire d’observation sur le prix (signe d’une grande préoccupation morale), un frac et un pantalon noirs, chez un des principaux maîtres tailleurs établis sous les piliers de la Calle-Mayor.

Covachuelo dit qu’un marchand du Rastro avait vendu une veste, un gilet et une ceinture de manolo à un homme en redingote noire et en pantalon blanc, qui, selon toute probabilité, n’était autre que don Andrès de Salcedo en personne.

Tous deux s’étaient déshabillés dans l’arrière-boutique et étaient sortis revêtus de leurs nouveaux costumes, qui, vu la classe de la société à laquelle ceux qui les portaient semblaient appartenir, étaient à coup sûr des déguisements. Dans quel but, le même jour, et presque à la même heure, un homme du monde avait-il pris la veste de majo, et un majo le frac d’un homme du monde ? c’est ce que les faibles moyens d’agents subalternes comme les pauvres Argamasilla et Covachuelo ne sauraient décider, mais que devinerait infailliblement