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MADEMOISELLE DE MAUPIN.

pourras lui dire tout ce que tu voudras, pourvu que cela soit convenablement gazé, et elle te permettra les choses les plus libres en paroles d’abord, et ensuite en action. Aie soin seulement de rouler tendrement les yeux quand elle aura les siens baissés, et parle-lui des douceurs de l’amour platonique et du commerce des âmes, tout en employant avec elle la pantomime la moins platonique et la moins idéale du monde ! Elle est fort sensuelle et très-susceptible ; embrasse-la tant que tu voudras ; mais, dans l’abandon le plus intime, n’oublie pas de l’appeler madame au moins trois fois par phrase : elle s’est brouillée avec moi, parce qu’étant couché dans son lit, je lui ai dit je ne sais plus quoi en la tutoyant. Que diable ! on n’est pas honnête femme pour rien.

— Je n’ai pas grande envie, d’après ce que tu me dis, de risquer l’aventure : une Messaline prude ! l’alliance est monstrueuse et nouvelle.

— Vieille comme le monde, mon cher ! cela se voit tous les jours, et rien n’est plus commun. — Tu as tort de ne pas te fixer à celle-là : — Elle a un grand agrément, c’est qu’avec elle on a toujours l’air de commettre un péché mortel, et le moindre baiser paraît tout à fait damnable ; tandis qu’avec les autres on croit à peine faire un péché véniel, et souvent même on ne croit rien faire du tout. — C’est la raison pourquoi je l’ai gardée plus longtemps qu’aucune maîtresse. — Je l’aurais encore, si elle ne m’avait pas quitté elle-même ; c’est la seule femme qui m’ait devancé, et je lui porte un certain respect à cause de cela. — Elle a de petits raffinements de volupté on ne peut plus délicats, et ce grand art de paraître se faire extorquer ce qu’elle accorde très-librement : ce qui donne à chacune de ses faveurs le charme d’un viol. Tu trouveras dans le monde dix