ma figure contre leur mufle de loup-cervier ou de blaireau. Quant aux poëtes, ils ne considèrent dans le monde que la fin des mots, et ne remontent pas plus loin que la pénultième, et il est vrai de dire qu’ils sont difficiles à utiliser convenablement ; ils sont plus ennuyeux que les autres, mais ils sont aussi laids et n’ont pas la moindre distinction ni la moindre élégance dans leur tournure et leurs habits, ce qui est vraiment singulier : — des gens qui s’occupent toute la journée de forme et de beauté ne s’aperçoivent pas que leurs bottes sont mal faites et leur chapeau ridicule ! Ils ont l’air d’apothicaires de province ou de répétiteurs de chiens savants sans ouvrage, et vous dégoûteraient de poésie et de vers pour plusieurs éternités.
Pour les peintres, ils sont aussi d’une assez énorme stupidité ; ils ne voient rien hors des sept couleurs. — L’un d’eux, avec qui j’avais passé quelques jours à R***, et à qui l’on demandait ce qu’il pensait de moi, fit cette ingénieuse réponse : — « Il est d’un ton assez chaud, et dans les ombres il faudrait employer, au lieu de blanc, du jaune de Naples pur avec un peu de terre de Cassel et de brun rouge. » — C’était son opinion, et, de plus, il avait le nez de travers et les yeux comme le nez ; ce qui ne rendait pas son affaire meilleure. — Qui prendrai-je ? un militaire à jabot bombé, un robin aux épaules convexes, un poëte ou un peintre à la mine effarée, un petit freluquet efflanqué et sans consistance ? Quelle cage choisirai-je dans cette ménagerie ? Je l’ignore complétement, et je ne me sens pas plus de penchant d’un côté que de l’autre, car ils sont aussi parfaitement égaux que possible en bêtise et en laideur.
Après cela, il me resterait encore quelque chose à faire, ce serait de prendre quelqu’un que j’aimasse, fût-ce un portefaix ou un maquignon ; mais je n’aime