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a revêtue pour vous plaire. Dafné en ce moment était charmante, soit que la beauté du prince l’émût réellement, soit que l’approche d’une action hasardeuse donnât à ses traits une profondeur d’expression qui ne leur était pas habituelle.

Lothario l’avait rassurée de son mieux en disant que l’amour comme la flamme et le vin de la cuve ne souffrait rien d’impur, et qu’il suffisait de s’aimer pour devenir tout de suite deux beaux petits anges. Cette morale facile et légèrement moliniste parut du goût de Dafné, dont le prince entourait avec son bras la taille souple, comme Othello reconduisant Desdémona.

Affectant la poitrine délicate, Dafné simula une petite toux, et dit, elle qui jadis culottait les pipes quand elle était la Judith du rapin Holopherne : « La fumée de ces cigares m’entête et me suffoque, si nous allions dans ma chambre, il y fait plus frais ! »