Page:Gautier - Ménagerie intime (Lemerre 1869).djvu/119

Cette page a été validée par deux contributeurs.

juments : l’une s’appelait Jane et l’autre Betsy. En apparence elles se ressemblaient comme deux gouttes d’eau, et jamais attelage ne fut mieux appareillé pour les yeux ; mais autant Jane avait de courage, autant Betsy était paresseuse. Tandis que l’une tirait à plein collier, l’autre se contentait d’accompagner, se ménageant et ne se donnant aucun mal. Ces deux bêtes, de même race, de même âge, destinées à vivre box à box, avaient l’une contre l’autre la plus vive antipathie. Elles ne pouvaient se souffrir, se battaient à l’écurie et se mordaient en se cabrant dans leurs traits. On ne put les réconcilier. C’était dommage, car avec leur crinière droite et coupée en brosse comme celle des chevaux du Parthénon, leurs narines frémissantes et leurs yeux dilatés de colère, elles avaient, en descendant et en montant les Champs-Élysées, une mine assez triomphante. Il