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pies dans la caisse de l’association qu’il me devait de la reconnaissance, tandis que je ne lui devais rien.

Ce fut donc à titre de largesse qu’il accepta, après s’être beaucoup défendu, le magnifique diamant que le roi lui offrait, et la somme importante qui devait être distribuée à tous les acteurs de la troupe.

Moukounji s’était approché et je fis comprendre à Parvati que je désirais ne pas l’abandonner. Il se tenait le mieux qu’il pouvait, on ne s’aperçut pas qu’il était ivre, et il fut convenu qu’on l’emmènerait à Golconde.

Tous les artistes, dans leurs costumes de spectacle, étaient réunis sur la piste.

Je fis mes adieux, le plus affectueusement que je le pus, mais ils me semblaient déjà loin, loin de moi, comme oubliés, enveloppés de brouillard et de nuit.

J’avais retrouvé ma lumière, ma joie, ma vie ; je ne voyais plus que cela et, tandis que les bouchons de champagne sautaient et que les verres se choquaient en mon honneur, ce fut comme dans un rêve que je quittai pour toujours le Cirque des Deux Mondes, absorbé que j’étais dans l’immense bonheur de sentir de nouveau sur mon dos le poids léger de mon adorée princesse, enfin reconquise.