Page:Gautier - Lucienne, Calmann Lévy, 1877.djvu/80

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

crue si pimbêche. Si tu te mets du côté des parents, et si tu as l’intention de rapporter, dis-le, je ne te raconterai pas mon histoire.

— Comment peux-tu avoir une pareille idée ? reprit Lucienne s’efforçant d’être calme. Voyons, qui est-ce, ton amoureux ?

— Oh ! je n’en sais rien… On ne va pas si vite !

— Ah ! … fit Lucienne qui respira.

— Voilà ! j’ai trouvé une lettre, dans ma chambre, sur mon oreiller. Heureusement que je suis entrée seule. Maman m’avait envoyé chercher un fichu de laine parce qu’elle avait froid. Et j’ai trouvé cette lettre. Tiens, mon nom est dessus : « Mademoiselle Jenny Després. » Et comme ça sent bon !

— Voyons, lis-moi le poulet, dit Lucienne.

Jenny déplia la lettre et lut.

« Mademoiselle !

» Comme l’étoile du marin, vous vous levez dans ma nuit noire… »

— Oh ! oh !

— Tu ne trouves pas ça joli ?

— Continue.

« Mais vous ne brillez pas pour moi seul, hélas ! Tout le monde vous contemple et vous adore. Votre cour, je le gage, doit faire envie à celle de plus d’une Majesté… »

— Comme il se trompe ! dit Jenny, en s’interrompant ; il compose ma cour à lui tout seul.

Elle reprit :

« …Vous trouverez, j’imagine, bien hardi qu’un