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dorés, jusqu’au jour où elle mourait d’inanition ; mais elle avait fait des petits, lesquels, forts et bien constitués, devaient tenir tout ce qu’avait promis leur mère. Rien ne le rebutait, rien n’ébranlait sa foi dans la destinée, et, perdu dans ses rêves d’avenir, il sentait à peine les rigueurs de la vie présente.

La jour où nous le trouvons assis à la table de M. Duplanchet, Panurge était perplexe ; ses grands yeux jaunes se fixaient en s’écarquillant sur la pointe de son long nez un peu rouge du bout dans sa pâleur d’anémique.

— Mon cher, disait-il à Hippolyte Richard, je ne sais pas du tout comment je vais m’en tirer, si ces deux engagements m’arrivent à la fois. Naturellement j’opte pour Paris, mais que va penser de moi le directeur du théâtre de Lyon ? il va me prendre pour un fantoche.

— Dame ! à moins de te couper en deux, dit Hippolyte d’un air narquois.

— Laisse donc ! dit Marie Lepot, les directeurs n’ont jamais répondu aux nombreuses pétitions que tu leur adresses. Ceux-là ne vont pas faire exception à la règle.

— Je suis sûr que si, dit Panurge en secouant son abondante chevelure. Les autres ne m’ont pas répondu parce qu’ils étaient absents ; ou bien mes lettres ne sont pas parvenues.

— Les employés de la poste connaissent son écriture et ils confisquent tes missives pour avoir des autographes, dit Hippolyte.