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debout sur la grève et grelottant un peu dans son peignoir de flanelle.

Elle restait là immobile, perdue dans une contemplation inquiète. Le vent secouait l’étoffe qu’elle serrait autour d’elle ; l’écume de la dernière vague venait mouiller ses pieds.

— N’ayez crainte, ma petite dame ! lui cria le baigneur ; donnez-moi la main, je vais vous faire entrer. N’allez pas trop loin, ajouta-t-il lorsque Lucienne eut franchi les premières vagues, la mer est un peu brutale.

Elle attendait qu’Adrien revint vers le rivage, pour mettre son projet à exécution.

— Je pousserai un cri, pensait-elle, puis je me laisserai couler bravement.

Mais le jeune homme continuait à s’éloigner ; elle le voyait à peine, les vagues le lui cachaient à chaque instant ; la fatigue commençait à la gagner, elle s’essoufflait ; l’écume des vagues, la frappant sans cesse au visage, l’étourdissait.

— Je pourrais bien me noyer pour de bon ! se dit-elle.

Personne ne se baignait et, comme la mer était houleuse, on n’avait pas mis le canot à l’eau. Lucienne était loin du rivage, elle regarda autour d’elle avec un commencement d’angoisse. Son cœur battait vivement ; mais elle ne voulait pas appeler, ce n’était pas par le baigneur qu’elle désirait être secourue.

— Du calme, voyons ! se dit-elle.