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XII


L’été s’écoula assez tristement. Stéphane n’étant pas là, on n’avait plus aucun goût aux promenades en mer. Lucienne et le vieux marin erraient toutes les soirées le long de la plage, ou bien ils s’étendaient sur les galets, regardant la mort du soleil.

M. Lemercier semblait plus affecté cette fois que d’ordinaire de l’absence de son fils. Lucienne regardait souvent à la dérobée l’expression soucieuse de son visage, et elle se disait que, peut-être, il avait un pressentiment du mal secret dont souffrait Stéphane. On parlait souvent du jeune lieutenant et on relisait bien des fois ses lettres. Elles arrivaient à des époques irrégulières ; d’abord très-fréquentes, elles devinrent plus rares à mesure qu’il s’éloignait de la France. Il était resté plusieurs mois à Toulon, expérimentant de nouveaux engins de guerre ; puis, après une longue station sur les côtes d’Algérie, il partait pour les colonies ; la dernière lettre reçue annonçait ce départ. Stéphane parlait beaucoup de Lucienne dans ses lettres et savait lui faire comprendre qu’il l’aimait toujours avec la même ardeur et avec le même dé-