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pirait son amant l’attachaient davantage à lui ; mais Stéphane l’attendrissait, et il occupait certainement la seconde place dans son cœur.

Aussi, lorsqu’il vint un jour lui annoncer que l’ordre de départ lui était arrivé, elle devint pâle et eut un violent serrement de cœur.

— Vous partez ! vous partez ! murmura-t-elle en baissant la tête.

— Vous m’aimez donc un peu, que vous êtes triste de cette nouvelle ? dit-il.

— Mon frère ! dit Lucienne en lui tendant les mains.

C’était vers la fin de l’automne. Stéphane partit un dimanche, à cinq heures du matin. Il fit ses adieux à Lucienne la veille au soir, en la reconduisant chez elle pour la dernière fois.

— N’oubliez pas, lui dit-il, qu’en n’importe quelle circonstance de votre vie, maintenant, dans vingt ans, toujours, si vous avez besoin d’un cœur dévoué et fidèle, je suis là. Appelez-moi, et j’abandonnerai tout pour voler à votre aide. Promettez-moi, si l’occasion se présente, de ne pas hésiter, de me considérer comme une chose à vous.

— Je vous promets, Stéphane, de me souvenir toujours de votre admirable cœur et de vous appeler dans la détresse.

— Au revoir, alors ; adieu peut-être, dit-il.

Et il la regarda avec l’angoisse de ne plus la revoir.

— Au revoir, frère ! pas adieu.

Il lui serra les mains une dernière fois.