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V


La réaction prévue par M. Lemercier ne tarda pas à se manifester. Tout le monde connut bientôt la mésaventure du docteur Dartoc. On s’écria que c’était un méchant homme, qu’il avait comploté la perte d’une innocente, qu’il méritait bien ce qui arrivait, et qu’il fallait à l’avenir se défier de lui. La semonce qu’il avait dû subir chez la modiste fit rejaillir sur lui un certain ridicule ; il surprenait des sourires moqueurs ; sur son passage on lui décochait des phrases ironiques ; si bien qu’il s’enferma chez lui pendant plusieurs jours se disant malade, et qu’il songea sérieusement à donner sa démission et à quitter la ville.

Lucienne était vengée.

Les commandes abondaient ; on venait chez la jeune modiste, beaucoup par curiosité, pour lui parler, pour la voir. Mais le prétexte était toujours l’achat d’un chapeau ou d’une coiffure.

— Vous êtes vraiment mon bon génie, disait Lucienne à M. Lemercier ; vous avez écarté tous les nuages sombres qui s’amassaient au-dessus de ma