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— Mais vous mourrez d’ennui ! Est-ce qu’on peut vivre ainsi, toute seule ? Vous n’avez donc pas de parents ?

— Je suis orpheline, madame.

— C’est égal, pour rechercher ainsi la solitude, il faut qu’un bien grand chagrin ait assombri votre vie, dit madame Maton, en la regardant attentivement.

— Je n’ai ni père ni mère, dit la jeune fille, ce chagrin-là suffit, je n’en ai point d’autre.

— Elle est vraiment touchante, murmura Max, en retenant une larme.

En ce moment, le docteur Dartoc entra brusquement dans le magasin.

— J’ai vu la voiture de madame Dumont à la porte, dit-il ; j’en ai conclu, ce qui était facile, que vous étiez ici, et je n’ai pas voulu passer si prés de vous sans vous saluer.

Madame Dumont le menaça du doigt.

— Vous voulez me faire entendre que je suis peut-être indiscret en pénétrant ainsi chez mademoiselle, dit-il. Mais, présenté par vous, je suis sûr d’être bien accueilli. N’est-ce pas, mademoiselle, continua-t-il, vous me pardonnez de poursuivre mes amis jusque chez vous ? D’ailleurs, je suis on ne peut plus heureux de faire votre connaissance, et de pouvoir vous dire que je suis tout à votre service, et que je serai flatté d’être votre docteur et de vous donner mes soins, si par malheur vous étiez souffrante.