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paresseuse par la chaleur, elle ne s’était pas habillée de la journée.

Partout dans le salon coquet et futile, des cartons étaient posés sur les meubles. Le canapé disparaissait sous des robes étendues. Aux torchères, de chaque côté de la glace, on avait accroché par l’élastique deux ravissants chapeaux d’été que la modiste venait d’envoyer.

Quelques voitures roulant dans la vue empêchèrent la jeune femme d’entendre la porte du salon s’ouvrir derrière elle ; et elle poussa un léger cri en voyant un homme se laisser tomber dans un fauteuil, après avoir déplacé une boîte à gants.

Cet homme paraissait soixante ans environ. Il était un peu chauve, et ses favoris grisonnaient.

— Eh bien, as-tu trouvé, ma chère Lucienne ? dit-il, tout essoufflé par la montée de l’escalier, et en s’essuyant le front.

— Oui, dit-elle ; « plage magnifique, hôtel très-confortable, joli casino… »

— Tu appelles cela un endroit tranquille ! dit le nouveau venu en tendant la main.

— Soyez sûr que c’est un trou, dit-elle, en lui passant le Guide en Normandie. D’ailleurs je consens à me reposer quinze jours dans ce désert pour obéir à mon docteur, ensuite nous irons à Trouville. Vous entendez, monsieur Provot.

— Hélas ! oui, soupira-t-il. Puis, fermant un œil, soulevant la lèvre il approcha le livre de son visage,