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lançant lançant sur ses pieds, et regardant d’un air maussade par la fenêtre ouverte.

— Ah ! c’est vous, dit-il en tournant à demi la tête.

Puis il se remit à regarder au dehors.

— C’est moi, dit Lucienne, j’ai à vous parler.

M. Provot ne répondit rien.

— Il boude, se dit Lucienne ; c’est juste, il est dans son droit.

Il sifflotait un petit air, et continuait à se balancer en faisant crier ses bottines.

— Je vous en supplie, mon ami, dit la jeune femme, emmenez-moi, partons d’ici aujourd’hui même, retournons à Paris.

— Ah çà ! tu perds la tête ! s’écria M. Provot, en laissant éclater toute sa mauvaise humeur. Tu crois peut-être que je vais céder à tous les caprices d’une personne qui a si peu d’égards pour moi ? Tu te trompes, ma chère, il me plaît d’avoir aussi une volonté. Tu me prends vraiment pour une girouette. J’ai pris mes habitudes ici, les bains me font grand bien, le temps est magnifique… mais va te promener ! mademoiselle s’ennuie et veut s’en aller. Eh bien, qu’elle s’en aille ! je ne la retiens pas. Je ne serai pas fâché de la voir partir. Je pourrais alors avouer à ces braves gens que je les ai trompés, et leur conseiller, s’ils rencontrent ma nièce sur leur chemin, de lui tourner le dos.

— Grand Dieu ! s’écria Lucienne, qui devint blême, puis pourpre. Si vous dites cela, je vous tue.