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qu’il serait heureux de les voir réunis le lendemain chez lui. Les disciples ne manquèrent pas au rendez-vous, et se placèrent dans la rue, devant la maison du marabout, qui sortit et vint à eux en leur disant :

— Vous êtes tous mes enfants, vous m’aimez comme un père et vous êtes résolus à faire en tout ma volonté ?

Les disciples répondirent unanimement : « Oui ! » à toutes ces questions.

— Eh bien, ma volonté est de vous égorger tous. À la fête du beiram, on immole des moutons ; il me plaît de vous prendre pour victimes. Que celui d’entre vous qui m’aime véritablement et qui a foi en moi entre dans la maison pour que je le tue.

Cette proposition étrange fit hésiter les disciples, et, franchement, il y avait de quoi. Cependant, l’un d’eux se décida et dit au marabout :

— Prends ma vie, si tu crois que cela soit utile, ou seulement si cela te fait plaisir !

Sidi-Mhammet-ben-Aïssa fit entrer le disciple dévoué dans son logis et lui donna un de ces cent moutons, en lui recommandant de l’égorger de manière que le sang coulât dans la rue.

Puis il sortit et renouvela sa proposition. Peu rassurés par ce ruisseau rouge, qui semblait annoncer l’im-