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toute liberté aux regards de plonger dans des charmes variant du cirage au chocolat pour la nuance, et du concombre au potiron pour la forme. Il y a cependant quelques exceptions, mais elles sont rares. — Une ceinture placée sous les aisselles, comme les tailles du temps de l’Empire, leur passe tantôt sous la gorge, tantôt par-dessus, et le plus habituellement la coupe en quatre, coquetterie ingénieuse qui les fait ressembler aux statues de la Nature à mamelles multiples.

Les joues et le front de ces négresses sont presque toujours tatoués de raies imprimées au fer chaud, marques des différents maîtres qui les ont possédées. De triples rangs de rassade, des chaînes de laiton et autres doreloteries sauvages pendent de leur cou, et forment sur leur poitrine un papillotant fouillis de paillon et de fanfreluches, auquel vont se joindre les pendeloques démesurées de boucles d’oreilles monstrueuses. Les bras sont chargés de bracelets d’ivoire, de cuivre ou de métal plus précieux, selon la richesse du maître ou de l’esclave. Un anneau d’argent rempli de grenaille de plomb leur cercle le bas de la jambe, et fait, lorsqu’elles marchent, un petit bruissement singulier.

Rien n’est plus étrange que de voir ces grandes figu-