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admirables ; ce sont les dignes fils des artistes qui ont fouillé, sur les murailles des salles de l’Alhambra et de l’Alcazar de Séville, ces versets et ces légendes que nul ornement ne peut égaler en élégance et en richesse. Ils ont habituellement à côté d’eux quelques volumes anciens et un pot d’eau où trempe une branche de myrte, qui, dit-on, donne à l’eau un goût agréable.

Nous aimons assez cette façon de mettre les hommes de lettres en boutique, et nous regrettons fort qu’on n’ait pas cette habitude à Paris.

Pour compléter le tableau du commerce algérien, disons un mot de ces négresses qui, accroupies aux angles des rues, tiennent sur leurs genoux ou près d’elles des piles de galettes chaudes valant quelques liards chacune. La plupart sont des esclaves de familles ruinées par la conquête, qui cherchent par ce moyen à procurer du soulagement à leurs maîtres déchus.

Les négresses sont en grand nombre dans la ville d’Alger ; elles circulent librement partout et à visage découvert, leur couleur étant sans doute regardée comme un masque suffisant. Leur habillement consiste en un pagne de Guinée à carreaux bleus qui les enveloppe de la tête aux pieds, en caleçons blancs retenus au genou, et en une chemise fort ouverte qui laisse