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diocres ou franchement mauvaises, et cela, lorsque le goût formé est devenu superbe et dédaigneux ; commencer par l’ambroisie et finir par la panade, c’est triste ; mais qu’y faire ? Le seigneur Pococurante, dans son palais de la Brenta, se consolait en disant du mal des grands poëtes et des grands maîtres qui ne l’émouvaient plus ; nous ne l’imiterons pas, certes. La Leçon d’anatomie du docteur Tulp nous produisit, moins la surprise, le même effet qu’autrefois. Le cadavre, d’une pâleur bleuâtre, était toujours étendu sur la table de dissection, et les disciples de Tulp, têtes douces, graves et réfléchies, le regardaient avec une curiosité sans horreur ; car ce qu’ils demandaient à la mort, c’était le secret de la vie. Le professeur tenait dans sa pince les nerfs du bras dépouillé de sa peau et faisait sa leçon, toujours religieusement écoutée. Toutes ces figures sont des portraits sur lesquels on pourrait encore mettre les noms, car la tradition les a conservés. Nous ne les transcrivons pas, nous les avons déjà cités ailleurs. Ces noms, hérissés de consonnes, — le Hollandais économise les voyelles comme si elles étaient plus précieuses que les autres lettres, — ne représenteraient rien à nos lecteurs. Ceux qui les portaient, recouverts par l’oubli, n’ont laissé d’eux que leur ombre sur cette toile. Là, ils