Page:Gautier - Loin de Paris.djvu/337

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tête ridée et grisonnante, sculptée en casse-noisette de Nuremberg, et dont la lueur d’une lampe tenue haut faisait ressortir par de vives lumières et de fortes ombres la laideur fantastiquement bizarre.

Sur quelques mots de notre guide, l’être singulier nous livra passage, referma soigneusement la porte derrière nous, et nous conduisit, avec une démarche et des regards de somnambule, au dernier étage de la maison, dans une grande chambre à trois lits.

Cet hôtel n’avait pas l’apparence des hôtels ordinaires. On n’y voyait aucune de ces recherches confortables qui caractérisent les grandes auberges allemandes : ni tapis dans les escaliers, ni corridors à perte de vue, ni sonneries électriques ; mais on était frappé par un certain air de modestie, de réserve et de froideur plus facile à comprendre qu’à décrire. Des images de madones dans des cadres de bois noir décoraient les paliers, et notre chambre était ornée d’une suite de gravures représentant les sept sacrements à l’aqua-tinta. Dusseldorf est pourtant une ville protestante, et ces imageries pieuses sont rares dans les villes qui suivent la religion réformée. Cette maison à physionomie monastique devait être une auberge de pèlerins ; car on sait qu’il s’en rend chaque année un