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d’un coup de canon, l’écho célèbre du lieu, qui répond en honnête écho incapable de tromper la confiance des voyageurs et de la compagnie.

On ne comprend pas comment tous ces oiseaux de proie du moyen âge, au bec et aux serres d’acier, pouvaient vivre n’ayant autour de leurs aires qu’un cercle si restreint de rapines ; il devait leur arriver souvent de jeûner sur leurs pics inaccessibles et de danser comme des noix sèches dans leur coquille de fer, tout hauts barons, tout seigneurs du mont et de la plaine qu’ils étaient. Et quels étranges logis ! murs crénelés suivant les anfractuosités de la route, superpositions de tours, donjons, se dressant au milieu de la triple enceinte comme une citadelle dans la forteresse, passages souterrains, salles obscures et voûtées ; on a peine à croire que des êtres humains aient vécu là, guettant par les étroites meurtrières le chariot sur la route, la bateau sur le fleuve. Que de batailles, de surprises, d’escalades, de meurtres ont dû avoir lieu dans ces repaires, habitations de héros brigands !

Quelques-unes de ces ruines sont telles que le temps, la guerre et les ravages de toute sorte les ont faites, c’est-à-dire fort belles, lézardées, ébréchées, effondrées d’une façon sinistre et pittoresque. D’autres sont rac-