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vées, et sur la gauche le Neckar faisait de temps en temps apparition.

Il était cinq heures et demie lorsque nous entrâmes à Mannheim, une ville toute blanche, toute neuve, toute régulière, d’un aspect riche et fashionable, avec des maisons à l’italienne, entremêlées de jardins ; des palazzines à balcons vitrés, formant serre sur les quatre faces, à terrasses ornées de balustres, à vases remplis de fleurs ; des hôtels gigantesques, capables de loger des légions de voyageurs ; des rues larges à faire pâmer d’aise un Anglais, et des promenades presque royales.

Nous descendîmes à l’hôtel de l’Europe, d’où l’on a une vue admirable sur le Rhin, qui baigne presque le mur de remblai du jardin, et, après un repas succulent et délicat que nous avions bien mérité, n’ayant rien mangé depuis Strasbourg, pour finir notre journée si bien remplie, nous allâmes voir jouer Norma, en allemand, au théâtre de la ville, qui est fort beau et bien décoré.

Nous ne vîmes que le dernier acte, car le spectacle se couche de bonne heure de l’autre côté du Rhin. Mademoiselle Kern, grande et forte jeune femme, manœuvrant très-bien des bras superbes et fronçant un sourcil