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tacle qui vous surprend toujours, quelque préparé que vous puissiez y être.

Deux palais magnifiques, celui d’Othon-Henri et celui de Frédéric IV, forment équerre au coin droit de la place, encombrée de végétations, de pierres et de débris de toute sorte ; le côté gauche est occupé par les ruines effondrées, crevassées du sévère manoir gothique de Louis le Barbu. Un puits monumental, que recouvre un portique ogival à colonnes de granit gris, et la porte d’entrée garnissent l’autre pan.

Nous n’aurons pas l’outrecuidance de refaire après Victor Hugo la description détaillée des merveilleuses ruines d’Heidelberg ; nous ne voulons que rendre en quelques lignes une impression qui, pour n’être pas nouvelle, n’en fut pas moins vive.

Faut-il maudire les bombes du général Mélas ou les bénir ? Nous pencherions pour ce dernier parti. Elles ont ébréché, juste à point, ces deux palais, vulgairement superbes peut-être dans leur intégrité, pour en faire les ruines les mieux réussies du monde. — La preuve que ces bombes tant anathématisées n’ont pas nui au monument, c’est que le bruit répandu d’une restauration prochaine a soulevé chez tout le monde artiste des tirades élégiaques et passionnées. — Si l’on