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cette légende, talisman mystérieux qui semble avoir préservé la maison de l’incendie, des boulets et de la ruine : Si Jehova non ædificet domum, frustra laborant qui ædificant eam. La foi chrétienne éclate encore dans l’inscription suivante, parfaitement orthodoxe : Soli Deo gloria ; mais la renaissance était trop fière d’avoir retrouvé l’antiquité et la mythologie perdues pendant le moyen âge, et elle mettait un aimable pédantisme à prouver qu’elle avait lu ses auteurs ; aussi écrivit-elle sur cette triomphante façade, entre les deux pieux versets : Præstat invicta Venus. — Traduction un peu libre de la devise chevaleresque « Dieu et les dames ».

Pour monter au château en voiture, on sort de la ville, car il faut prendre la montagne à revers, et l’on suit quelque temps la rive du Neckar, une jolie rivière qui écume avec un murmure de torrent, sur de petits écueils, entre de hautes pentes boisées d’une verdure admirable, puis on s’engage dans une route ombragée de grands arbres, qui escalade par des zigzags contrariés l’escarpement assez rude de la fière colline, à travers des masses de feuillages moirées d’ombre et de soleil de l’effet le plus prestigieux. Cette promenade est un vrai enchantement. Quand on approche du sommet, on