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voir. — Après le Parthénon et l’Alhambra, le château d’Heidelberg est la plus belle ruine du monde ; — nous mettons à part les ruines de Karnac que nous n’avons point encore vues.

Ce n’est pas la faute d’Heidelberg s’il a été pris, saccagé, bombardé à plusieurs reprises ; et on ne doit pas lui en vouloir des maisons blanches, propres, neuves et tout à fait modernes qui bordent sa grande rue, presque entièrement composée d’hôtels, de brasseries, de magasins, de boutiques de libraires, de confiseurs, de marchands de tabac. — La maison du chevalier de Saint-Georges, sur la place de l’Église, montre ce que savaient faire les anciens architectes, et la comparaison des œuvres, il faut l’avouer, n’honore pas les architectes modernes. — Cette façade vermoulue, mais conservée soigneusement, est un rare échantillon de l’art charmant de la renaissance, demi-païen, demi-catholique, original dans sa double imitation. Figurez-vous un pignon aigu, trois rangées de fenêtres, deux tourelles ou plutôt deux cabinets projetés faisant saillie à travers les trois étages ; semez là-dessus des mascarons, des bustes, des chimères, des feuillages, quelques vieilles dorures en harmonie avec la rouille vermeille de la pierre, et tracez au fronton en lettres lapidaires