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l’escalier, dépouillé au retour de son mystère, puisque nous savions qu’il conduisait de la partie haute de la ville à la vallée profonde découpée par l’Aar. Pas plus à la montée qu’à la descente, aucun malandrin ne nous sauta à la gorge, nous demandant l’escarcelle ou la vie, comme cela eût été convenable, vu le style moyen âge du décor.

Quelle chose fâcheuse que d’être obligé de dormir en voyage ! combien d’heures perdues ! L’excitation nous eût bien tenu éveillé ; mais le lustre était éteint, la rampe baissée, le spectacle fini, et, à moins d’illuminer Berne aux flambeaux, il n’y avait plus moyen de rien voir. Force nous fut de nous coucher.

Le lendemain de très-bonne heure, car nos minutes étaient comptées, nous sortîmes et nous parcourûmes en calèche découverte la grande rue de Berne, que nous devions quitter au premier départ du chemin de fer pour Bâle. Eh quoi ! vous voilà déjà en route ? Isaac Laquedem, « qui souffre à demeurer », s’arrête au moins pour boire la chope de bière que lui offrent les bourgeois de Bruxelles en Brabant !

Il y a deux manières de voyager : la première consiste à passer dans chaque ville trois ou quatre jours, une semaine ou davantage s’il le faut, pour visiter les