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Nous ne ferons pas une description particulière des Verrières, de Moitiers, de Couvet, traversés au trot de la diligence ; mais nous pouvons dire le sentiment de surprise que nous avons éprouvé à rencontrer dans cette gorge solitaire des groupes d’habitations humaines si riches, si élégantes, si confortables, si bien tenues, et, chose rare, d’une construction originale. Les toits de ces maisons et souvent les étages supérieurs sont couverts de petites tuiles rondes de bois imbriquées et papelonnées comme des écailles de carpes, tandis que le rez-de-chaussée se revêt de carrés de bois simulant la pierre et taillés en pointe de diamant ; aux arêtes des toitures scintillent des chaperons en fer-blanc d’un vif éclat métallique. Les chambranles des croisées et des portes sont rechampis d’un blanc qui tranche sur les couleurs vives des murailles, et, derrière les vitres, la mousseline suisse étale ses larges ramages. Chaque maison a son jardin rempli de fleurs et ombragé de marronniers aux thyrses roses. La Reuse, ou d’autres ruisseaux qui s’y rendent, traverse tout cela, apportant la fraîcheur et l’animation que l’eau donne au paysage, toujours incomplet sans elle. C’est l’horlogerie qui a fait, dit-on, les loisirs et l’opulence de ces bourgs charmants, où il semble qu’on