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nous avons tâché de motiver à nos propres yeux notre départ soudain, en nous disant qu’on annonçait pour le 23 ou le 24 une exposition de l’industrie à la Haye, et qu’une exposition de l’industrie à la Haye (en hollandais S’gravenhaag) devait être bien curieuse.

Tout chemin mène à Rome : le dicton est vrai de toute autre ville quelconque, et notre itinéraire le prouve victorieusement. Nous aurions voulu rejoindre notre ami About en Italie, que nous n’eussions pas pris une autre route. Seulement, à Dijon, nous laissâmes le convoi filer vers Lyon et la Méditerranée, et, par l’embranchement de Dôle, nous arrivâmes à Salins le soir du même jour.

On s’habitue si vite à ce qui est, qu’en ce siècle de chemins de fer une diligence semble un mastodonte de la carrosserie, un engin de locomotion perdu et retrouvé par hasard sous quelque hangar tertiaire. À la faible clarté du ciel nocturne et aux rayons vacillants de quelques lanternes, nous regardions avec un œil de naturaliste le monstre antédiluvien qui devait nous emporter de Salins à Neuchâtel ; sa structure excitait notre étonnement et nous en faisions l’anatomie comparée. On nous établit d’une façon assez confortable dans une sorte de coupé à trois pans très-bien disposé pour voir,