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que tant de siècles de barbarie ont pu faire subir à un délicat chef-d’œuvre à la portée de la masse d’armes du soudard et de la pierre du gamin, cet éternel destructeur ; les figures du milieu et des extrémités sont très-endommagées, mais les autres groupes n’ont guère perdu que la tête et des portions de bras ; les torses sont entiers et les draperies ne comptent qu’un petit nombre de déchirures à leurs plis de marbre.

On peut encore en admirer le jet libre et fier, les ondulations harmonieuses jouant autour des corps, plutôt comme une atmosphère que comme un vêtement. Les figures ont de ces poses équilibrées et rhythmées, de ces fléchissements de jambes, de ces saillies de hanches qui plaisaient tant aux anciens, et qui étaient comme la musique des formes humaines. — Une immortelle beauté brille à travers les mutilations stupides, et les divins manchots, les héroïques décapités gardent leur puissance sur les âmes artistes.

Les autres faces, plus ou moins frustes, sont occupées par une suite de guerriers représentant une bataille idéalisée, dont il est impossible de désigner le nom et de préciser la date. — Le nom de toutes les victoires grecques voltige sur les lèvres ; mais aucune ne s’abat