Page:Gautier - Loin de Paris.djvu/192

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à traîner au matadero les corps des bêtes mortes. Des palefreniers en veste et en culotte de velours bleu, en bas blancs, en escarpins et en chapeau à cornes, les contenaient à grand’peine.

Toutes ces formalités accomplies, le cortége se retira, et il ne resta dans la place que les combattants et les gens indispensables.

Parmi les quatre gentilshommes, deux paraissaient assez médiocres écuyers et luttaient contre la fougue de leur monture avec plus ou moins de bonheur ; même l’un d’eux, le champion du duc de Medina-Celi, avait été désarçonné et obligé d’aller faire à pied son salut au balcon royal ; don Miguel Romero, par son assurance modeste et la grâce avec laquelle il maniait son cheval, paraissait réunir le plus de chances, et, si la mode anglaise des paris avait gagné l’Espagne comme la France, les gros enjeux eussent été de son côté.

Les caballeros étaient à leur poste, le rejoncillo à la main, ayant chacun à côté d’eux l’espada qui devait leur ménager les coups et les défendre en cas de péril… Une attente anxieuse oppressait les poitrines de trente mille spectateurs.