Page:Gautier - Loin de Paris.djvu/19

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la mer ne fût pas encore tout à fait apaisée de sa colère de la veille.

Le Pharamond eut bientôt dépassé les îlots de rocher sur l’un desquels est bâti le château d’If, ce séjour peu récréatif qui a fourni à Lefranc de Pompignan le prétexte de tant de rimes en if. Les environs de Marseille, quoique arides et nus, sont constellés de bastides ou maisons de campagne qui, vues de la mer, ressemblent à des dés répandus sur une table de jeu. Les fenêtres figurent assez bien les points. — C’est là qu’ont lieu ces fameuses chasses au châtre dont on fait de si belles histoires. La montagne, couronnée par Notre-Dame-de-la-Garde, domine la ville et se profile pittoresquement à l’horizon. — Les côtes sont hérissées de rochers des formes les plus bizarres, et de falaises spongieuses, grenues et sèches comme de la pierre ponce que le soleil calcine et mordore de ses rayons. C’est déjà l’Afrique !

Rien n’est plus gracieux et plus gai que le mouvement d’embarcations légères qui se fait à l’entrée du port. C’est un va-et-vient d’étincelles blanches d’un effet charmant ; on dirait des plumes de cygne promenées par la brise. Le même vent fait aller tout cela en sens inverse, grâce à certaines impulsions obliques qu’on