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même décoration, ainsi que l’Académie royale de Saint-Ferdinand ; seulement, à l’Académie de Saint-Ferdinand, le dais ne recouvrait qu’une statue en plâtre de la reine. La maison de la marquise d’Alcanices disparaissait sous d’antiques et précieuses tapisseries de Flandre, mêlées de soie, d’argent et d’or.

Une foule innombrable contenue par deux files de soldats coulait à flots pressés de chaque côté de la calle de la Villa, de la calle Mayor, de la calle d’Alcala et du Prado, attendant l’apparition du cortége. Chaque fenêtre encadrait un groupe de jolies têtes en mantilles ; partout scintillaient les lorgnettes et palpitaient les éventails. Un tour dans les rues de Madrid, ce jour-là, eût équivalu à un voyage complet en Espagne ; toutes les provinces y étaient représentées par nombreux échantillons : ici, le Maragate au chapeau à larges bords, au pourpoint du cuir, au ceinturon fermé par une boucle de cuivre, dont le costume n’a pas varié depuis le moyen âge ; là, le Valencien aux grègues de toile blanche, aux jambes entourées de cnémides avec sa capa de muestra sur l’épaule, les alpargatas et le foulard qui enveloppe sa tête, rasée comme celle des Bédouins ; ici, l’Andalous avec ses guêtres de cuir de Ronda, ouvertes en dehors, sa faja de soie rouge ou