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brume du matin, au milieu des échoppes et des maisons qui ne lui vont qu’à la cheville.

On a souvent déploré que la plupart des monuments gothiques fussent obstrués, dans leurs parties inférieures, par des constructions ignobles : leur effet y perd beaucoup, dit-on, et, s’ils étaient débarrassés de ces excroissances parasites, de ces verrues hideuses, champignons malsains de l’architecture, ils gagneraient en grandeur et en perspective. Nous croyons tout le contraire ; ces laides bâtisses forment d’excellents repoussoirs, et l’édifice jaillit mille fois plus svelte et plus élégant de ce chaos de murailles et de toits ; l’idée chrétienne se dégage de cette confusion, clairement symbolisée par ces hautes tours et ces nefs colossales, s’élevant au-dessus des petites misères de la vie et de la réalité. En bas, tout est tumulte, trivialité, laideur : montez, et vous trouvez des arcs-boutants aux délicates nervures, les roses des vitraux, les anges en sentinelle ; montez plus haut encore, et dans le ciel de Dieu vous voyez luire, sous un rayon, la croix de son fils.

La dévotion espagnole se lève de bonne heure, l’église était déjà ouverte ; nous pouvions entrer, à notre choix, par les portes d’une des trois façades, du Pardon, des Apôtres, ou bien de la Pelliceria.