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tours, dépeçant quelque carcasse abandonnée sur une voirie. — Les lambeaux de draperie qui palpitaient sur ce groupe impur simulaient assez bien de vieilles ailes flasques.

À la fin, ivres de ce repas de Lestrygons, fatigués des délires de cette nuit orgiaque, les aïssaoua tombèrent lourdement çà et là et s’endormirent d’un sommeil inerte.

La tête me tournait, j’avais des vertiges et des nausées, et ce ne fut pas sans un vif sentiment de plaisir que je me retrouvai sur la route de Blidah, où l’air frais du matin eut bientôt balayé ces terribles visions nocturnes — qui sont pourtant des réalités.



VI

LA DANSE DES DJINNS

Quand j’arrivai à Constantine, le jour était près de finir. Les nuances orangées du couchant, se rencontrant avec le bleu du ciel, produisaient des tons de turquoise rayés de quelques stries de nuages étroits, bruns par-dessus, frappés par-dessous de reflets rou-