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vous donc des préfaces qui contiennent un volume en quelques pages, et qui vous épargnent la peine de parcourir une longue enfilade de chapitres pour arriver à l’idée de l’auteur. La préface de l’auteur, c’est le postscriptum d’une lettre de femme, sa pensée la plus chère : vous pouvez ne pas lire le reste.

Pourtant, n’allez pas inférer de ce que je viens de dire qu’il y ait une idée dans celle-ci ; je serais désespéré de vous induire en erreur. Je vous jure sur ce qu’il y a de plus sacré, (y a-t-il encore quelque chose de sacré ?) je vous jure sur mon âme, à laquelle je ne crois guère ; sur ma mère, à laquelle je crois un peu plus, qu’il n’y a réellement pas plus d’idée dans ma préface que dans un livre quelconque de M. Ballanche ; qu’il n’y a ni mythe, ni allégorie ; que je n’y fonde pas de religion nouvelle comme M. G. Drouineau ; que ce n’est pas une poétique ni quoi que ce soit qui tende à quelque chose : je n’y fais même pas l’apologie de mon ouvrage. Vous voyez bien que ma préface ne ressemble en rien à ses sœurs les autres préfaces.

Seulement je profite de l’occasion pour causer avec vous ; je fais comme ces bavards impitoyables qui vous prennent par un bouton de votre habit, monsieur ; par le bout de votre gant blanc, madame, et vous acculent dans un coin du salon pour se dégorger de toutes les balivernes qu’ils ont amassées pendant un quart d’heure de silence. En honneur, ce n’est pas pour autre chose. Je n’ai pas grand’chose à faire, ni vous non plus, je