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mabué ; le linéament est simple et naïf, un peu sec, comme toutes les choses primitives ; les tons sont éclatants, sans crudité, quoique les demi-teintes manquent en quelques endroits ; c’est de la vraie poésie catholique, croyante et pénétrée, comme un plus grand poëte ne saurait la faire maintenant. Parmi toutes ses sœurs les ballades, ou fantasques, ou libertines, ou ignobles, celle-ci s’épanouit pure et blanche comme un lis au cœur d’un bourbier. Elle montre que Villon pouvait faire autre chose que ce qu’il a fait, s’il avait eu le bonheur de trouver un Alexandre, comme Diomèdes le pirate ; mais il n’eut pas ce bonheur, et la destinée fut plus forte que lui. Il lui fallut, malgré ses bonnes intentions, suivre jusqu’au bout la route où il était engagé. Il mourut on ne sait où, et pauvre, sans doute, comme il avait vécu.


Item, mon corps j’ordonne et laisse
À notre grand’mère la terre ;
Les vers n’y trouveront grand’graisse,
Trop lui a faict faim dure guerre :
Or, lui soit délivré grand’ erre[1].
De terre vient, en terre tourne ;
Toute chose si par trop n’erre,
Voulentiers en son lieu retourne.


Sonnez les cloches du beffroi à double branle, sonneurs, vous aurez quatre miches ; arrivez, coquillards énarvants à Ruel, francs-mitous, sabouleux, marpeaux et mions, argotiers, Bohêmes, Égyptiens, zingari, truands, mauvais garçons, matrones, filles folles de leurs corps, voleuses d’enfants, devineresses, sorcières, entremet-

  1. Promptement.