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ou d’artiste dramatique, comme on dit maintenant. Ô public, bête brute ! c’est pourtant pour se faire jeter des pommes crues par toi que l’on se résigne à un pareil martyre ! — Cette vie ainsi faite prête singulièrement à l’imagination, et peut fournir une excellente donnée de comédie, quoique M. Casimir Delavigne en ait fait une fort méchante sur ce sujet, et qui a eu de la réputation en ce temps-là.

Un autre poète, Gougenot, de Dijon, compatriote de la moutarde, a fait aussi une Comédie des Comédiens. — La pièce du Dijonnais porte le même titre que celle de M. le gouverneur de Notre-Dame de Lagarde ; et je ne sais trop comment arranger tout cela avec la prétention de Scudéry, qui appelle sa comédie poème de nouvelle invention dans le genre que les Italiens nomment capriccioso. La pièce de Gougenot est de 1603, et celle de Scudéry de 1605, ce qui est une forte présomption en faveur du premier. Cependant le drame du second est plus spirituel et conduit plus fantasquement, et nous ne mentionnons l’autre que pour mémoire.

M. le comte de Vigny n’a pas dédaigné de nous dire que Chatterton lui avait coûté dix-sept nuits de travail. — Scudéry commence par nous informer que si l’impression fait réussir sa pièce aussi bien que le théâtre, il ne plaindra pas quinze jours que sa production lui a coûtés. Quinze jours sont moins prétentieux que dix-sept nuits : mais pour l’époque cela n’est pas mal.

Chut ! voici le prologue… C’est le fameux Mondory ; il indigné des choses absurdes qu’on lui veut faire accroire. Ses camarades sont assurément fous. Ils lui disent qu’il n’est point sur un théâtre et que c’est ici la ville de