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rieurs. — On sent bien le Louis XIV et sa cour à travers tous ces princes goths et ces seigneurs scandinaves. Ils portent tous des perruques in-folio, des cuirasses lamées et des tonnelets. Le costume ressemble assez à celui des batailles d’Alexandre. Ce sont des guerriers couverts d’écailles jaunes d’un côté et rouges de l’autre, avec des baudriers tout chargés de passequilles, des draperies volantes gorge-de-pigeon, des aigrettes et des plumets démesurés, le nez au vent et les pieds en dehors, comme s’ils allaient danser le menuet ; des chars massifs sculptés et dorés, traînés par de gros chevaux d’un blanc de satin, à croupes énormes, et la queue congruement troussée ; de grands arbres avec de longues feuilles profondément découpées et d’un vert cru ; des barques à proue historiée, manœuvrées par des hommes demi-nus, couleur de potiron, et faisant saillir académiquement tous les muscles de leurs bras noueux ; des paysages où le jaune et l’outremer dominent ; des mers d’un ton de poireau ; des palais à gros pavillons avec des terrasses et des rampes ; des allées d’orangers dans des caisses vert-pomme ; des ronds d’eau, des buffets d’eau, des jets d’eau et toute l’hydraulique des jardins de Versailles. Tout cela se retrouve dans l’Alaric, dessin, costume, couleur, architecture, paysage ; l’époque s’y reflète entièrement, jusque dans les moindres détails. — Ne dirait-on pas que ceci a été crayonné et colorié par Lebrun ou Parrocel ? c’est le portrait d’une guerrière ;


Ses cheveux ondoyants, à grosses boucles d’or.
Tombant négligemment, l’embellissent encor ;