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fautes qui s’y trouvaient, entre autres celle d’avoir mis en eau douce des tritons, divinités essentiellement salées, ce qui est une énorme incongruité mythologique. Il lui fit avoir une gratification de cent louis et une pension de six cents livres de la part du roi, procédé généreux s’il en fut, et dont on ne voit pas que Racine ait été très-reconnaissant.

Chapelain était, en effet, le plus honnête homme du monde, allant au devant des occasions d’obliger, ami sincère et effectif, plein de politesse et de mesure, fait pour plaire également à la cour et à la ville. Il n’y a guère autre chose à lui reprocher que d’avoir fait des vers inexprimablement durs et mortellement ennuyeux. Boileau lui-même, son plus acharné ennemi, ne peut lui refuser toutes ces belles qualités dont nous avons fait le catalogue ci-dessus :


Qu’on vante en lui la foi, l’honneur, la probité,
Qu’on prise sa candeur et sa civilité,
Qu’il soit doux, complaisant, officieux, sincère,
Je le veux, j’y souscris, et suis prêt à me taire.


C’est principalement dans la Pucelle que Chapelain s’est élevé à cette puissance de coriacité et de dureté qu’on lui voit, car ses odes et ses petites pièces sont d’un tour net et coulant et ne manquent pas d’harmonie. Voici quelques strophes de l’ode au cardinal de Richelieu que Boileau trouvait assez belle, et qui est, à coup sûr, beaucoup moins rocailleuse que l’ode sur la Prise de Namur :


Grand Richelieu de qui la gloire,
Par tant de rayons éclatants,