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sim ; in culpa est coqua mea quæ mihi hodie bilem moverat quod pultem meam vino madida male condidisset. Hanc tibi plectandam et anagrammatibus lacerandam trado. Quod ut facere possis hujus tibi nomen mitto, ea est Elisabetta de Santo Marcello quod nomen cum fere omnia litterarum elementa complectatur tantum tibi anagrammatum quantum toti obruenda sis satis facile sufficiet. — Vale. »


Après avoir passé quelque temps dans différentes maisons de l’ordre, le père Pierre de Saint-Louis fut envoyé régenter à Saint-Marcelin. Le soin de sa classe lui prenait presque tout son temps, en sorte qu’il ne pouvait que très-peu travailler à son poème, ce qui le contrariait fort. Il mit cinq ans à l’achever et parachever, et ce ne fut pas sans peine qu’il le guinda à cette hauteur de ridicule souverain et inaccessible où nous le voyons. Il restait quelquefois des jours entiers et plus sur un vers : ceux-là sont probablement les plus mauvais de tous, ce qui n’est pas peu dire.

Le poème fini, le plus difficile restait à faire, c’est-à-dire de le faire imprimer. Les supérieurs craignaient qu’une pareille publication ne jetât du ridicule sur l’ordre, et que les libertins n’en prissent sujet pour faire de mauvaises plaisanteries sur les religieux et la religion. Ils n’auraient cependant pas voulu chagriner et désobliger le père Pierre de Saint-Louis, qui, à ce travers près, était le meilleur homme qui fût au monde : humble, exact à ses devoirs, et de tout point un très-digne religieux. Aussi le père provincial, à qui il demanda la permission