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point, et qu’une métaphore étoit une extravagance. »

Ces lignes ont été écrites au commencement du 17e siècle, et, en vérité, on les croirait détachées de la préface de quelque livre romantique éclos d’hier ; elles montrent que la lutte des deux principes a existé de tous les temps, que la perruque n’est pas une invention moderne, et qu’elle subsiste depuis la confection du monde. Au 17e siècle comme au 16e, on retrouve toujours la routine qui veut régenter l’inspiration avec sa lourde férule, et qui donne la recette pour être pindarique, élégiaque ou héroïque, à volonté. C’est la grande querelle des modernes et des anciens, qui a commencé à Ronsard et qui n’est pas encore finie ; car Ronsard, dont les romantiques ont relevé la statue, tant honnie et tant conspuée, par une espèce de contradiction qui ne manque pas de logique, est indubitablement l’introducteur du classicisme en France. Il a rompu violemment avec le bon vieil esprit gaulois dont Clément Marot est le dernier représentant. C’est bien lui, Pierre de Ronsard, le gentilhomme vendomois, qui a pris par la main le chœur des Muses antiques et qui les a présentées en cour avec un habit mi-parti grec, mi-parti gaulois. Il a changé les ballades, les chants royaux, les rondeaux et toutes les formes nationales de notre poésie contre les strophes les antistrophes, les épodes et les formes grecques et latines ; il a forgé des épithètes barbares dans le goût de celles que vous venez de voir, et bien d’autres encore ; il a fait des mots à deux faces, Janus difformes que la grammaire ne peut regarder sans épouvante, et dont Durbatas a si étrangement abusé ; il a syncopé des verbes, il a