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toutes sortes. — Nul ne dupe entièrement son époque, et, dans les réputations les moins fondées, il y a toujours quelque chose de vrai ; un public n’a jamais complètement tort d’avoir du plaisir, bien qu’il puisse lui arriver souvent de rester insensible à de véritables beautés, comme le prouvent des exemples par malheur trop fréquents. On a souvent peine à comprendre certaines vogues, certains engouements pour des écrits qui nous paraissent maintenant de l’insipidité la plus nauséabonde, et qui faisaient pâmer d’aise les précieuses de l’hôtel Rambouillet, et toute la confrérie de la célèbre chambre bleu de ciel !

Des billevesées, des fadaises ennuyeuses à périr, étaient écoutées religieusement, discutées et pesées au trébuchet, syllabe par syllabe, comme des pièces d’or. Là où nous ne voyons rien, les Philamintes découvraient un million de choses. Il fallait donc que ces ouvrages, tant prônés, tant choyés, répondissent, par certains côtés, aux idées répandues alors, car la raison :


Un sot trouve toujours un plus sot qui l’admire,


qui sans doute est valable individuellement, perd sa rigueur axiomatique, quand il s’agit d’un public étendu ; — un sot, — oui ; — plusieurs sots, — non.