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tendu d’une autre personne que d’Edith, annonça l’impatience du visiteur mystérieux.

La pauvre Edith déplaça un petit meuble qui masquait à moitié la fausse porte, et tira les verrous d’une main tremblante.

Une clé manœuvrée du dehors grinça dans la serrure, et le battant entrebaillé et refermé aussitôt donna passage à un homme qui n’était pas M. de Volmerange.

Le personnage introduit d’une façon si singulière et si secrète chez une jeune fille, qui, dans quelques heures, devait être la femme d’un autre, avait une physionomie dont il eût été difficile de trouver d’abord le caractère. Son teint légèrement olivâtre, d’un ton mat, faisait ressortir deux yeux singulièrement mobiles et dont l’expression était amortie à dessein ; la bouche était bien coupée, mais les lèvres minces et serrées semblaient garder un secret, et la lèvre inférieure, fréquemment mordue, indiquait des élans comprimés et des soumissions nécessaires acceptées par la volonté, mais non par le sang. Le nez, trop fin dans son arête, trop pointu malgré sa correction, donnait au reste de la figure une expression d’astuce. C’était une de ces têtes auxquelles on ne saurait trop reprocher aucun défaut, que l’on est forcé d’avouer belles, et qui pourtant produisent un effet de répulsion dont on ne peut se rendre compte. Cette figure attirait et repoussait à la fois par une espèce de grâce dangereuse et de charme inquiétant. Les couleurs qui brillent gaîment sur l’aile de l’oiseau prennent, sans perdre de leur éclat, sur la peau tachetée du reptile une nuance