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de sinistre et d’horrible ; une grille que la poussière de charbon de terre, tamisée par les cent mille cheminées de Londres, avait rendue plus enfumée que les soupiraux de l’enfer, entourait ce champ de repos que l’agitation immédiate de la ville rendait encore plus morne.

La haute tour enfonçait dans la brume sa couronne de clochetons invisibles et semblait décapitée ; le porche fuligineux et sombre comme la voûte d’un four, ouvrant son arcade béante, avait l’air de la gueule d’une orque ou de quelque autre bête démesurée soufflant de la fumée par les mâchoires. Le brouillard qui baignait l’arceau gigantesque, produisait l’effet de l’haleine de ce monstre architectural.

Certes, sans être superstitieux, un jeune couple pouvait, à l’aspect de cette église lugubre, concevoir quelques craintes pour son bonheur futur. Le frisson vous tombait invinciblement sur les épaules en franchissant cette voûte plus obscure que celle de l’Érèbe, et qui ne laissait trembloter au bout de sa profondeur aucun rayon du jour, aucune étoile d’espérance.

Assurément il eût été injuste de demander à une vieille et rigide église protestante de Londres, à la fin de septembre, un jour de brouillard, l’aspect heureux et gai d’un temple antique déroulant la théorie de ses colonnes blondes sur l’azur d’un ciel athénien ; mais, en vérité, ce matin-là, Sainte-Margareth avait plus mine d’une crypte sépulcrale bonne à recevoir des morts que d’une église à bénir le mariage de deux époux amoureux.

— Eh bien ! disait dans la voiture sir Williams