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massif d’arbres, s’élança vers elle, et saisissant son châle, que retenait une forte épingle de pierreries, fit des efforts pour arracher ce riche tissu.

Le domestique accourut ; mais un coup de poing appliqué en pleine face, d’après les plus saines règles de la boxe, l’envoya rouler à quatre pas, le nez saignant et la bouche meurtrie.

Le voleur tirait toujours le châle à lui, et la jeune femme, presque étranglée, pouvait à peine appeler au secours par de faibles cris étouffés dans sa gorge.

Arrivé au détour de l’allée, Volmerange vit le groupe aux prises, et d’un bond tombant au milieu de l’aventure, rétablit l’équilibre par un coup de canne en travers qui coupa la figure du voleur comme un coup de sabre, et le fit s’enfuir, hurlant de douleur malgré l’intérêt qu’il avait à se taire.

La jeune femme avait éprouvé une frayeur si vive quelle chancelait sur ses jambes et que Volmerange fut obligé d’abandonner la poursuite du larron pour le soin de la soutenir.

Lorsqu’elle fut un peu revenue à elle, Volmerange allait se retirer après avoir salué gravement, mais la jeune femme étendant la main l’arrêta dans son mouvement de retraite et lui dit d’une voix timide et suppliante :

— Oh ! monsieur, soyez chevaleresque jusqu’au bout, et daignez me reconduire à ma voiture. Mon pauvre garde-du-corps Daniel est en assez piteux état, et je crains que me voyant seule de nouveau, les malfaiteurs ne reviennent à la charge.

Il n’y avait guère moyen de dire non à une