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cher. Les balles pétillaient sur son cuir comme si des mouches l’importunaient.

Quant à Dakcha, il tenait à la main une touffe de la sainte plante cousa qu’il froissait entre ses doigts en murmurant l’ineffable monosyllabe om.

La confusion devenait inexprimable, les mousquets détonaient, les flèches sifflaient, les chevaux hennissaient, les éléphants vagissaient et glapissaient, les blessés se plaignaient : la fumée concentrée par la voûte du feuillage flottait en nuages lourds sur les combattants.

Un gros d’Anglais plus braves et plus résolus que les autres essayait opiniâtrement l’escalade de l’éléphant de Volmerange ; mais la bête intelligente, acculée à un monstrueux boabab, se servait de sa trompe comme d’un fléau, et les renversait demi-morts des coups formidables qu’elle leur assénait sur la tête : ceux qui échappaient à la trompe n’évitaient pas les balles de Volmerange ou de ses Mahrattes.

Cette lutte ne pouvait durer longtemps. Priyamvada, qui rechargeait les fusils de Volmerange, fut atteinte dans la poitrine ; elle ne poussa pas un seul cri ; mais une écume rose monta à ses lèvres et signa son dernier baiser sur la main de Volmerange, qu’elle prit, et eut la force de porter à sa bouche, près lui avoir tendu son second mousquet chargé.

Le coup de Volmerange partit et tua raide l’Anglais qui avait visé la pauvre Priyamvada.

Trois des cinq Mahrattes qui s’étaient placés à côté du jeune descendant de Douchmanta avaient glissé à terre du haut de leur forteresse mouvante, tués ou mortellement blessés.