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les cruautés de l’amour

— Mais elle est charmante, vraiment ! Allons donc, approche !

Clélia s’avança d’un air gauche et timide en roulant entre ses doigts le bord de sa tunique.

— Quels yeux ! quels cheveux d’or ! s’écria le jeune homme. D’où diable sort-elle ? Eh bien, sers-moi le thé.

La jeune fille obéit.

— Comment t’appelles-tu, hein ?

— Clélia.

— Sais-tu que tu me plais !

— C’est bien de l’honneur pour moi, murmura-t-elle avec un imperceptible sourire.

— C’est incroyable comme tu es jolie. Si tu veux, je t’emmène avec moi. Qu’en dis-tu ?

— Mais, seigneur… balbutia Clélia.

Il lui avait pris les deux mains et la tenait debout devant lui.

— C’est convenu, tu viendras avec moi, reprit-il ; mais d’abord, embrasse-moi.

Et il la saisit brusquement dans ses bras.

Clélia poussa un cri et essaya de se dégager.

— Est-ce pour voir cela que l’on m’a envoyé chercher ? s’écria tout à coup André qui entra impétueusement dans la salle et repoussa le seigneur.

— Eh ! qu’est-ce qui te prend, à toi ! dit celui-ci en devenant pourpre ; ne sais-tu pas qui je suis !